Septembre 18, 2023 - Vigneron·ne·s à la une - Aucun commentaire
Pierre Goiset, back to Muscadet
Saint-Fiacre-sur-Maine, Muscadet
Pierre Goiset a quitté Saint-Etienne et les terroirs du Rhône pour devenir vigneron dans le Muscadet, en 2021. Depuis il a découvert pas mal de choses : le gel, les joies du tracteur et le charme modeste de la campagne nantaise.
D’abord, le vin
Les néo-vignerons sont relativement rares, dans le vignoble nantais. Encore plus ceux qui arrivent d’autres régions. C’est pourtant le cas de Pierre : même s’il a des racines dans les parages de Nantes, il a mené la première partie de sa vie d’adulte à Saint-Etienne, comme cameraman de films institutionnels. « Mais je m’ennuyais un peu », explique-t-il. Le désœuvrement mène à tout, y compris dans les vignes à mi-temps, à partir de 2013.
La ville a du bon, malgré tout, et notamment un bar à vins naturels tenu par des bénévoles dans son quartier. « Je m’y suis mis aussi. Au début, je n’aimais pas trop ça, confie Pierre. Ah ça, j’en ai eu des illuminations et des interrogations » en découvrant certains vins d’Ardèche. « J’aurais aussi pu m’installer en Beaujolais… mais c’est quand même sauvage là-bas. »
Ensuite, le Muscadet
Pierre et sa petite famille atterrissent donc en 2021 en Muscadet, à Saint-Fiace-sur-Maine, à 30 minutes au Sud de Nantes. C’est la « campagne modeste », sourit Pierre, sans l’effet « waouh » de certains vignobles ni l’ambiance « wild » du Beaujo… Mais c’est là qu’il a trouvé une maison pour sa famille, avec un espace attenant pour une cave, et surtout 3,13 hectares de vignes (2,6 ha de melon b. et 55 ares de merlot) à vendre, à la confluence de la Sèvre nantaise et de la Maine. Une parcelle sur orthogneiss et quartz, une autre sur le granit. De ses vignes, on aperçoit le porte-vue monumental de Château-Thébaud, pour ceux qui connaissent. « C’est le retour à la terre… Je réalise un peu aussi le rêve de mon père, qui aurait voulu s’installer sans jamais sauter le pas. »
Le cheval et le tracteur
Pour son premier millésime, Pierre est un vigneron sans tracteur. Quand, comme lui, on a appris le métier sur les côteaux du Rhône, dans des domaines en conventionnel, le « travail du sol » et la gestion de l’herbe et du climat nantais sont comme une nouvelle planète. « Un enjambeur (un tracteur qui passe au-dessus des rangs de vignes, le seul à pouvoir rouler en Muscadet, ndla) coûte surtout super cher ». Et sa préférence va de toute façon au cheval, une technique pour laquelle il est formé. Il a toutefois dû renoncer à sa propre monture, trop fougueuse, et faire appel à une prestataire. Pour les traitements (cuivre, soufre, tisanes, etc.), c’est la « brouette », un engin assez rudimentaire qui ressemble à un motoculteur orné de quatre buses et pèse horriblement lourd.
Bilan : « En 2022, j’ai récupéré un enjambeur et changé de technique », glisse Pierre. La prestataire est revenue avec son cheval, sur 1,5ha, et Pierre a doublé de vigilance sur la gestion de ses sols et des maladies. Mais le vigneron reste lucide : « Agronomiquement, je suis un peu à la rue. On lit plein de trucs, qu’il faut enherber, ne pas travailler les sols, etc. En réalité, ce n’est pas si simple. »
« . On lit plein de trucs, qu’il faut enherber, ne pas travailler les sols, etc. En réalité, ce n’est pas si simple. »
— Pierre Goiset.
Rudes débuts
Comme beaucoup de néo-vignerons qui s’installent aujourd’hui, Pierre a vite appris, et dans la douleur, à quel point son nouveau métier est tributaire des caprices du ciel. En 2021, le gel n’épargne pas ses vignes, comme à peu près aucun vigneron français cette année-là. Les rendements sont riquiqui : 13hl / ha en moyenne, quand il visait 30hl/ha. En 2022, il atteint 25hl/ha.
2023 sera sans doute encore en progrès (#jusqu’icitoutvabien). Mais un vigneron doit voir un peu plus loin que ça. Aussi Pierre rêve-t-il aujourd’hui de « restructurer son vignoble, en plantant d’autres cépages, et pourquoi pas des hybrides, pour ne plus avoir à traiter la vigne (contre le mildiou et l’oïdium, ndla). Ou d’avoir des cépages qui refont du raisin après le gel. »
Objectif vin nat’
Le millésime 2021 a produit 4500 bouteilles seulement, réparties en deux cuvées de melon b, la Mauguit (du nom d’une parcelle) et Querry, un rosé, un rouge et une bulle. Des cuvées aux volumes ultraconfidentiels, en mode « capsule », mais qui lui ont permis de se lancer (avec succès) dans la vinification et le commerce. En 2022, de plus gros volumes lui ont permis d’ajouter A Tâton, une cuvée parcellaire à sa gamme. Il faut goûter (et boire, évidemment) ces vins pour ce qu’ils sont : une nouvelle facette du Muscadet, un aperçu prometteur du vignoble nantais de demain.
Son objectif demeure de produire du vin naturel… mais il reste extra-prudent. Trop ? « Je ne suis pas encore prêt à abandonner la béquille du soufre », confie-t-il. Dans les vins de son premier millésime, il en a mis 25mg/L (total) (en dessous des seuils du label Vin Méthode Nature). « J’adore les vins un peu barrés… mais je crois que je n’assumerais pas. Et moi, j’ai besoin d’aimer mon vin pour le vendre. » Bio à la vigne, il ne filtre pas et n’utilise pas de levures, les fondamentaux du vin nat’ sont donc quoi qu’il en soit respectés. « Je suis passé d’un truc hyper cadré à quelque chose de très roots. En fait, je suis encore en train d’apprendre.»
Où trouver les vins de Pierre Goiset ?
(liste non-exhaustive)
- Paris : , Rerenga Wines, 3 Rue de la Fidélité, 75010 Paris - 06 42 34 06 92
- Nantes : Maison Jaja 14 bis Rue de Mayence, 44000 Nantes - 06 27 16 32 49
- Nantes : le Brocéliande, 40 Rue Préfet Bonnefoy, 44000 Nantes - 02 40 74 25 51
- Saint-Etienne : la Cempote, 3 Av. Grüner, 42000 Saint-Étienne - 04 77 37 63 04
Les cuvées de Pierre Goiset
Le vin rouge de Pierre Goiset
- Grande Falaise, merlot, sera mis en bouteille pour l’été 2023. Un vin de plaisir au toucher soyeux.
Les vins blancs de Pierre Goiset
- Querry, un melon B. parcellaire
- La Mauguit, un melon B. issu d’une parcelle d’orthogneiss et quartz, 6 mois sur lies. De la fraîcheur et un nez citron comme il se doit, avec un joli gras et des tanins en relief.
- A Tâtons, 100% melon (vignes des années 60) sur un terroir de granit qui apporte des notes anisées.
- Peau à peau, un melon B. en macération, une nouveauté 2022
Le vin rosé de Pierre Goiset
- Pampilles, merlot